Association des personnes concernées par le tremblement essentiel

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Dysfonctionnement du cervelet dans le tremblement essentiel.

Introduction

Les mécanismes physiologiques à l’origine du tremblement ne sont pas totalement élucidés mais des observations récentes suggèrent qu’une atteinte du cervelet serait impliquée dans le tremblement essentiel (TE). Suivant une démarche rarement adoptée, les auteurs ont exploré cette hypothèse en utilisant deux méthodes neurophysiologiques : l’inhibition cérébelleuse du cortex moteur (CBI) et l’adaptation à la déformation du champ visuel par un prisme.

 

Méthodes.

Vingt patients TE (14 hommes et 6 femmes, âge moyen 71.2 ans) et trente volontaires sains d’âge identique ont participé aux expériences. Tous les sujets n’ont pas participé à l’ensemble des tests et leur répartition a été la suivante : 18 patients et 19 volontaires pour le CBI ; tous les patients TE et 23 volontaires pour le test d’adaptation au prisme. Le tremblement était mesuré au moyen de l’échelle Fahn-Tolosa-Marin. Tout traitement était suspendu 18h avant les expériences.

L’expérience n° 1 (CBI) consiste à appliquer une stimulation magnétique au niveau occipital, entre l’inion et le processus mastoïde. Une seconde stimulation magnétique est appliquée sur le vertex, 5 à 10 ms plus tard, pour activer le cortex moteur correspondant à la main et évoquer la réponse musculaire du premier muscle interosseux dorsal (potentiel évoqué moteur MEP). La stimulation occipitale a pour effet de réduire la réponse évoquée par la stimulation corticale. Cet effet réducteur n’est plus observé dans certaines pathologies dues à un dysfonctionnement du cervelet,  ce qui suggère qu’il pourrait dépendre de l’activation d’un circuit cérébello-thalamo-moteur. Le rapport de l’amplitude des MEP avec et sans stimulation occipitale est calculé pour chaque valeur de l’intervalle qui sépare les deux types de stimulations.

L’expérience n°2 utilise un test mesurant les phénomènes d’adaptation qui permettent de corriger les images reçues par les yeux. Les sujets portent des lunettes dont les verres sont en forme de prisme, ce qui a pour effet de décaler le champ visuel. Ce décalage empêche la main d’atteindre correctement une cible. Mais après plusieurs essais, on note une adaptation du cerveau qui a appris à diriger le mouvement avec de nouvelles règles qui guident les commandes musculaires. Des expériences sur le singe ont montré que le cervelet était un chaînon du circuit nerveux qui, via les régions pontiques, assure cette adaptation. Les auteurs distinguent 2 grandeurs : 1- l’erreur asymptote (EA), valeur moyenne des erreurs horizontales pour atteindre la cible pendant la période des tests d’adaptation au prisme. EA est le signe d’une adaptation limitée ; 2- l’effet différé (ED), moyenne des erreurs dans les 5 essais qui suivent la période des  tests. ED reflète le degré d’adaptation.

Analyse de corrélation. Avec les outils statistiques appropriés, une analyse de corrélation est appliquée entre le score de tremblement Fahn-Tolosa-Marin et les valeurs de l’inhibition du cortex moteur (CBI) et les paramètres de l’adaptation EA et ED.

 

Résultats

L’amplitude des MEP est identique chez les patients TE et les volontaires sains. Le rapport entre la taille des MEP, avec ou sans choc occipital, indique que la CBI est significativement diminuée chez les patients TE pour des intervalles entre les stimuli de 4 à 8 ms.

Par comparaison avec les volontaires sains, l’erreur d’asymptote (EA) est plus grande (P<0.05) et l’effet différé (ED) est plus petit (P<0.05) dans le groupe TE.

Aucune corrélation n’a été observée entre le score de tremblement et les paramètres expérimentaux (CBI, EA, ED).

 

Discussion

Ces résultats montrent que la CBI et les capacités d’adaptation au test du prisme sont modifiés chez les patients TE.

Des travaux antérieurs, utilisant la stimulation transcrâniale magnétique, ont montré que les paramètres de l’excitabilité corticale restaient normaux dans le TE, ce qui indique que des MEP normaux peuvent être obtenus chez ces patients.  Dans la présente étude, la réduction de la CBI suggère un rôle du circuit cortex cérébelleux-noyaux dentelés- thalamus- cortex moteur. Deux études se sont déjà intéressées au CBI dans le TE. La première rapporte un CBI réduit chez des patients porteurs d’électrodes de stimulation dans le thalamus, en dehors des périodes de stimulation. La seconde constate que le CBI est normal chez 9 patients. Pour expliquer cette divergences avec leurs résultats, les auteurs évoquent la possibilité de différences entre les sous-types de TE analysés dans l’une et l’autre de ces études.

C’est la première fois qu’une étude montre que l’adaptation au test du prisme est anormale chez des patients TE. On sait que le cervelet joue un rôle crucial dans cette adaptation. En effet, des patients souffrant de dégénérescence spino-cérébelleuse ou d’infarctus de l’artère inférieure postérieure du cervelet présentent des réponses anormales aux tests. Chez l’animal, des lésions dans les régions postérieures du cervelet réduisent l’adaptation au prisme. Toutefois, celle-ci n’est pas modifiée quand les lésions touchent d’autres parties du cervelet. Ces données indiquent que l’adaptation au prisme est un bon outil pour évaluer le fonctionnement des cellules de Purkinje et des voies ponto-cérébelleuses.

Sur la base des résultats apportés par leur approche « fonctionnelle », les auteurs considèrent que le cervelet est étroitement impliquée dans le TE. Mais pour eux, une simple lésion, soit des efférents soit des afférents cérébelleux, ne suffit pas à expliquer leurs résultats. L’implication du cervelet pourrait refléter une lésion pathogène primaire ou un phénomène compensateur, secondaire à cette lésion.

Notons que les différences entre patients TE et sujets témoins  ont été observées chez des patients ne présentant pas de signes d’ataxie alors qu’une atteinte du cervelet entraîne fréquemment ce symptôme. Une explication possible de cette « dissociation » serait que les populations de cellules de Purkinje responsables de l’ataxie ne soient pas les mêmes que celles responsables du tremblement. Une autre possibilité serait qu’une atteinte modérée du cervelet entraîne des tremblements mais pas d’ataxie.

Cependant, parce que le TE est une pathologie hétérogène, les auteurs concluent prudemment qu’ils ne peuvent affirmer que tous les patients TE présentent un dysfonctionnement du cervelet et souhaitent que d’autres études soient entreprises pour éclairer ce point.

 

Article original:

Ritsuko Hanajima, Ryosuke Tsusumi, Yuichiro Shirota, Takahiro Shimizu, Nobuyuki Tanaka et Yoshikazu Ugawa. Cerebellar Dysfunction in Essentiel Tremor. Movement Disorders, 2016, 6, 1-9.

Résumé : Drs Marie-Hélène BASSANT et Nicole SARDA, dans le cadre du réseau ScienSAs’-INSERM.

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