Association des personnes concernées par le tremblement essentiel

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Kinésithérapie

Revue de la littérature paramédicale

Les traitements alternatifs dans la littérature scientifiques sont malheureusement assez peu documentés. Une revue de la littérature scientifique1 permet cependant de recenser toutes les publications (MEDLINE® / PubMed®, CINAHL®, Embase® et The Cochrane Library) sur les approches paramédicales méthodologiquement acceptables jusqu’en 2010. Une étude physiothérapique a analysé deux variables2 chez des personnes touchées par un tremblement essentiel :

  • le tremblement, par la capacité à maintenir l’index droit sans trembler pendant une minute mesuré par un accéléromètre,
  • une variable fonctionnelle : la capacité à tracer une spirale d’Archimède, une épreuve de verre d’eau à remplir et un questionnaire des activités de la vie quotidienne.

Après 4 semaines de renforcement musculaire du premier interosseux dorsal de la main, une évaluation avant et après et à 8 jours. Le gain de force musculaire (13,4 %) n’a pas significativement réduit le tremblement ni amélioré la fonction.

Trois études proposaient différents modèles d’orthèses pour atténuer le tremblement : l’une qui stabilisait la main pour l’écriture et le dessin, une autre contenait le membre supérieur en entier avec un contrefort visco-élastique pour absorber les tremblements et enfin, une orthèse équipée de moteurs électriques censés contenir les tremblements. Chacune apportait une amélioration modeste et non durable ou non évaluée dans le temps.

Le massage a été proposé à des personnes touchées par la maladie de Parkinson pour réduire leurs tremblements. Deux groupes randomisés, l’un avec du massage et l’autre uniquement avec de la musique relaxante. Les résultats furent significativement positifs pour la réduction des tremblements et apportèrent une nette amélioration sur la raideur et la bradykinésie mais de courte durée (8 jours).

Plusieurs études ont évalué les effets du froid sur les tremblements de personnes touchées par la maladie de Parkinson, de sclérose en plaques et du tremblement essentiel, les effets sont significatifs mais modestes.

Des stimulations électriques ont été appliquées sur les muscles responsables des tremblements chez des personnes touchées par la maladie de Parkinson, de la sclérose en plaques et du tremblement essentiel. L’atténuation moyenne la plus marquée concernait le groupe du tremblement essentiel (72 %), les groupes de la maladie de Parkinson et de la sclérose en plaque avaient respectivement 62 % et 38 %.

D’autres études scientifiques ont étudié les effets de la luminothérapie, l’effet des vibrations appliquées sur les tendons, des plateformes vibrantes pour des personnes touchées par la maladie de Parkinson et de la stimulation magnétique transcrânienne. Enfin des études ont démontré l’intérêt de lester l’extrémité des membres supérieurs pour améliorer le contrôle gestuel, ceci dans des tâches instrumentales (repas).

Toutes ces études obtiennent des résultats significatifs mais le nombre de personnes incluses est souvent faible, les situations sont expérimentales et non écologiques et les résultats à long terme sont absents ou défavorables.

Les conclusions générales des auteurs de cette revue de littérature portent sur la méthode : ils regrettent le trop faible recrutement de patients, leur hétérogénéité, l’absence de randomisation et d’études multicentriques qui empêchent de faire une véritable méta-analyse. Ils regrettent aussi les conditions des études qui sont le plus souvent éloignées de la réalité quotidienne des personnes malades, ne permettent pas un transfert de moyens et ne prennent pas assez en compte le ressenti de la personne malade (qualité de vie) comme par exemple des orthèses trop encombrantes.

Qu’en est-il des stratégies rééducatives ?

La rééducation a sa place par son approche raisonnée et centrée autour d’une difficulté fonctionnelle singulière. La rééducation, en particulier, de la préhension et plus généralement aux gestes fins comme l’écriture peut être proposée à certaines personnes concernées par le tremblement essentiel. Une intervention précoce (stades 1 et 2) aide la personne à mieux gérer ses difficultés et à les dédramatiser. Aux stades 3 et 4, ce sont bien souvent des adaptations du milieu de vie avec l’aide de l’ergothérapeute qui compléteront l’action de réadaptation du kinésithérapeute.

Stratégies rééducatives

Le kinésithérapeute cherche à intervenir sur les différentes variables du tremblement essentiel, en particulier sur l’amplitude, par exemple lors de l’écriture. Il s’agit d’apprendre à réaliser la tâche « autrement », en modifiant des habitudes ou en corrigeant des stratégies contre-productives, comme serrer très fort le stylo pour contenir le tremblement. Il n’est pas non plus exceptionnel qu’une dystonie soit associée au tremblement, avec une hypertonie excessive d’un muscle ou groupe musculaire entraînant une posture anormale du segment concerné lors de la fonction.

Le kinésithérapeute peut associer deux principales pistes stratégiques complémentaires pour contrôler les tremblements:

  • la recherche d’un contrôle mécanique en développant les compétences sensorimotrices de la personne malade,
  • la recherche d’un contrôle comportemental, les deux utilisant les ressources attentionnelles de la personne malade.

Stratégies sensorimotrices et comportementales

Le kinésithérapeute dispose :

  • de moyens mécaniques, comme le lestage du membre dans l’écriture en utilisant par exemple un bracelet, un stylo lesté (existant dans le commerce). Il peut rechercher à augmenter la stabilité d’un segment trembleur par un renforcement musculaire. Une étude récente3 reprend ce concept évoqué plus haut (Bilodeau et al, 2000) en l’étendant aux muscles du poignet et de l’avant bras : un renforcement de la main, du poignet et du coude a eu un effet significativement positif sur une série de six personnes incluses. Le programme comportait six semaines de renforcement musculaire avec des charges progressives impliquant flexion du coude et de flexion / extension du poignet deux fois par semaine (deux fois 40 minutes). L’évaluation de la préhension était nettement améliorée après et en particulier sur le membre le plus déficitaire.
  • de stratégies, comme « écrire avec l’épaule » pour « diluer » le tremblement sur tout le segment du bras, ce qui réduira sa force et son amplitude. Inversement, la crispation sur le stylo pour contrôler le geste renforce les tremblements. Pour l’écriture, il est souhaitable de corriger la posture en se redressant, de ne pas appuyer l’avant bras sur la table, de tenir le stylo avec une moindre tension. Il est également préférable de commencer par l’écriture sur tableau au mur ou sur table avec des graphiques simples et larges. Au fur et à mesure des progrès, des formats plus réduits et plus complexes seront recherchés incluant par exemple le sens horaire et antihoraire alterné. Une progression similaire sera réalisée sur papier. L’engagement vers l’écriture cursive sera précédé de succession de lettres liées ou non sans rechercher à recréer des mots porteurs de sens pour ne pas ajouter une charge attentionnelle.
  • parfois dans l’écriture, la mise en décharge d’un doigt, comme l’index, réduit les effets du tremblement. Le doigt restant en suspension au dessus du stylo, sans le toucher.
  • La clinique illustre aisément que le tremblement essentiel est augmenté lors d’une tâche centrée sur une cible, comme se servir un verre d’eau ou écrire. De la même façon, les personnes malades écrivent mieux si elles sont seules, détendues et si elles écrivent « machinalement » un court texte qui ne demande pas une forte concentration. À l’inverse, une forte concentration avec le souci de retrouver l’écriture « d’avant », devant un tiers, comme par exemple remplir un chèque au supermarché avec une longue file d’attente à la caisse, renforce considérablement les tremblements. Une étude4 a démontré que le feedback visuel augmentait le tremblement essentiel dans la posture du bretteur. L’amplitude des tremblements était plus faible en l’absence de rétroaction visuelle chez 14 personnes incluses sur 19 avec une réduction de 7 à 78 %.
  • Cette étude fait écho à d’autres études scientifiques qui montrent que l’attention visuelle est un facteur péjoratif pour le contrôle du tremblement. Le transfert de cette observation est simple, il suffirait de… ne pas regarder ce que l’on écrit ! Certaines personnes malades voient leurs tremblements diminuer simplement en visualisant leur écrit dans une vision périphérique, la vision fovéale étant réservée à une cible distante de quelques centimètres au dessus de la ligne d’écriture. Ainsi la personne malade peut suivre sa ligne et mieux contrôler le tremblement en n’y pensant pas.
  • Plus classiquement, les techniques de relaxation, de mobilisation passive, peuvent aider la personne malade à prendre conscience et agir sur une hypertonie compensatoire ou sur un état anxieux.
  • Pour la marche, il n’y a pas d’étude scientifique spécifique concernant le tremblement essentiel. En revanche, l’association britannique Ataxia UK a édité un guide de recommandations de bonnes pratiques. Dans ce guide sont évoquées trois études dans lesquelles des personnes ataxiques ont été améliorées par un ré-entrainement sur tapis roulant.

Conclusion

La rééducation des tremblements, et du tremblement essentiel en particulier, a été jusque là peu étudiée même si depuis toujours les personnes malades utilisent des stratégies d’adaptations. Au rééducateur d’aider la personne malade à opérer les choix judicieux et à les évaluer. L’analyse du bon geste au moindre coût pour contenir le tremblement doit être accompagnée d’un comportement adapté constitué de relâchement et d’une « concentration particulière ». Enfin, le renforcement musculaire semble une piste prometteuse et facile à réaliser. Des études cliniques à plus grande échelle seront les bienvenues pour conforter ces hypothèses de travail.

voir les références

Thierry Péron-MagnanArticle de Thierry Péron-Magnan, kinésithérapeute spécialisé dans les mouvements anormaux,
Centre national de référence Bernard Pépin pour la maladie de Wilson,
hôpital Lariboisière, Paris
(Thierry Péron-Magnan tient un blog)
mis à jour le 12/11/2012

 

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