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Observance autonomie et responsabilité

Sous le Haut Patronage de Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, le Collectif interassociatif sur la santé (CISS), Coopération patients et le collectif [im]Patients, Chroniques & Associés ont organisé un colloque Observance : autonomie & responsabilité le 1er juin 2015. Après l’annulation de l’arrêté par le Conseil d’État prévoyant la modulation et le déremboursement d’un traitement de l’apnée du sommeil en raison de la non-observance des personnes concernées, un débat s’est engagé sur l’observance des traitements par les personnes malades sous un angle le plus souvent économique. En effet, dans le cadre de la progression des maladies chroniques, l’observance est devenue un sujet majeur des politiques de santé publique. Cette journée d’échange public a apporté des éclairages globaux sur les aspects éthiques et juridiques, la dimension économique, les approches anthropologiques et sociologiques, les éléments de régulation publique et normative en matière d’observance.

2015.06.01 colloque Observance 2  - Christian Saout Danièle Desclerc-Dulac Marisol Touraine
Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS, Danièle Desclerc-Dulac, présidente du CISS et Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes

Danièle Desclerc-Dulac, présidente du CISS a ouvert ce colloque par un message de bienvenue en remerciant de sa présence Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes. Elle s’est interrogée sur la question de la sanction de la non-observance des traitements par les patients. L’arrêté prévoyant la modulation et le déremboursement d’un traitement de l’apnée du sommeil en raison de la non-observance des personnes concernées a provoqué une polémique et il est important d’ouvrir un débat sur l’observance afin de mieux comprendre les enjeux. Danièle Desclerc-Dulac a notamment souligné que l’observance, c’est aussi la qualité de la prescription médicale. Elle a remercié les différents partenaires de cette journée dont Coopération patients et le collectif [im]Patients, Chroniques & Associés mais aussi la CNAMTS, la direction générale de la Santé du ministère de la Santé, la mutuelle MGEN et aussi Alternatives économiques, Allô Docteurs, Réseaux, santé & territoire et les Éditions de Santé.

2015.06.01 colloque Observance 3 - Christian Saout Danièle Desclerc-Dulac Marisol Touraine
Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes avec Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS et Danièle Desclerc-Dulac, présidente du CISS

Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, a rappelé que la démocratie en santé est une priorité du gouvernement, le débat sur l’observance n’est pas seulement un débat en santé publique, il s’agit aussi d’un débat citoyen. Elle a rappelé les trois actions récentes concernant le droit à l’oubli pour les personnes guéries d’un cancer, l’action de groupe en santé dans la Loi de santé et la coconstruction des politiques de santé avec la création d’un Institut pour la démocratie en santé afin d’associer les pouvoirs publics, la société civile et les associations de personnes malades et en situation de handicap. L’observance est certes un enjeu de santé publique puisqu’elle permet l’amélioration de la santé mais il y a beaucoup de facteurs dans la non-observance et notamment des facteurs sociaux, familiaux etc. Il faut permettre l’autonomie, il faut que le patient puisse exercer sa liberté de manière éclairée, ceci pose le problème du diagnostic, de l’explication de ce diagnostic, de l’explication du traitement et du suivi thérapeutique.

La Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes souhaite promouvoir l’éducation et l’innovation en santé en expérimentant des programmes d’accompagnement, elle a confié en ce sens une mission à Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS et elle envisage aussi le soutien aux dispositifs médicaux innovants comme les objets connectés (piluliers connectés, stylos injecteurs, applis de suivi sur smartphones etc.). Elle souhaite aussi la mise en place d’un plan médecine du futur afin de mettre la technologie au service du patient. Elle engagera en ce sens un tour de France de l’innovation.

Mme Marisol Touraine a conclu son intervention en soulignant qu’elle ne souhaite pas une politique de la surveillance mais le développement d’une citoyenneté en santé pour développer l’autonomie des patients.

Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS
Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS

Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS a pris l’exemple des contrats associatifs dans l’autonomie des patients mis en place dans le sida ou le diabète ces dernières années. Il a précisé les obstacles à l’observance : la complexité des traitements, la durée du traitement, les effets secondaires, les connaissances personnelles concernant la maladie et les traitements, le dialogue avec le médecin et la capacité de la personne malade à exprimer ses préoccupations ou ses questions au médecin, les difficultés personnelles ou familiales. Il s’agit d’un défi collectif de santé publique, de soutenabilité économique, d’organisation du système de soins dans un contexte de bascule du système hospitalier vers un système ambulatoire. Christian Saout a souligné qu’il existe déjà des incitations positives à l’observance dont l’éducation thérapeutique du patient (ETP). Il a aussi souligné qu’une nouvelle donne a émergé avec l’arrivée de la e-santé et de la m-santé qui offre une capacité à surveiller l’observance, or il convient que la e-santé ne soit pas perçue comme un outil de surveillance mais bien comme un outil d’amélioration de la santé. Le CISS a mené une enquête dans la perspective de ce colloque et il apparaît pour 62 % des personnes interrogées que les professionnels de santé ne prennent pas en compte l’observance des traitements dans le suivi médical.

Il a conclu sur la nécessité de mettre l’humain au coeur du parcours de soins, du parcours de santé et du parcours de vie, l’attente des patients, c’est l’humain, pas le numérique et c’est bien cette attente qui sera souligné durant tout cette journée notamment de la part des associations de personnes malades et en situation de handicap. Christian Saout a notamment souligné la différence entre la France et d’autres pays européens ou du monde occidental dans le soutien aux approches de « patients experts » ou de « patients centrés » dans l’accompagnement des personnes atteintes de maladies chroniques.

 

 

Concept et expertises

 

Cette première plénière était animée par le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique.

2015.06.01 colloque Observance 6 - première plénière
Vincent Bildstein, président d’IMS Health France, le docteur Aline Sarradon-Eck de l’Inserm, le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique et le professeur Jean-Luc Harrousseau, président de la Haute autorité de santé

Le professeur Jean-Luc Harrousseau, président de la Haute autorité de santé (HAS) a rappelé les missions de la HAS. Améliorer l’efficience du système de soins et l’information du patient sont au coeur des missions de la HAS. Depuis 2003, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini l’observance, « améliiorer l’adhésion du patient à un traitement chronique ». L’observance est donc conçue comme une adhésion et non une obéissance à une ordonnance. Or l’adhésion au suivi médical, aux règles d’hygiène de vie, aux traitements reste de l’ordre de 50 % dans les pays développés et est encore inférieur dans les pays en voie de développement.

3 à 18% des patients ne se font pas délivrer leurs ordonnances dans les dix jours. 50% des patients font des erreurs minimes notamment pour l’horaire de prise et 40% des erreurs majeures comme l’omission de prise du traitement. 10% des patients effectuent des surdosages fréquents, 20% des modifications de doses. Il y a des raccourcissements volontaires des durées de traitement dans un tiers des cas. Entre 30 et 60% des personnes malades sont non-observants ou mal-observants. C’est notamment une problématique grave et fréquente chez les personnes âgées. Seulement 1% des patients ne fait aucune erreur sur une durée d’un mois.

Le professeur Jean-Luc Harrousseau, président de la Haute autorité de santé
Le professeur Jean-Luc Harrousseau, président de la Haute autorité de santé

Il existe plusieurs méthodes :

  • l’observation directe de l’observance, l’observation directe de la prise du traitement, elle est simple, elle est économique et elle ne nécessite aucun outil structuré. Cependant, elle nécessite le contrôle direct par un tiers.
  • l’observation par mesure du taux sérique, elle est objective et quantifiée mais elle nécessite des prélèvements sanguins et a un coût certain.
  • l’observation par la mesure d’un marqueur biologique dans le sang, c’est aussi une méthode objective mais elle nécessite aussi des prélèvements et des dosages.

Les méthodes de l’observance peuvent être :

  • le questionnaire du médecin, c’est une méthode simple, économique et elle n’exige aucun outil structuré, elle est cependant subjective et peu précise et les estimations sont compromises par la relation médecin-patient, une étude a montré des estimations correctes dans seulement 40% des cas.
  • l’auto-communication par le patient de son observance, c’est aussi un outil qualitatif simple et économique, elle est cependant subjective, peu précise et peut manquer d’honnêteté, elle surestime l’observance mais c’est actuellement la méthode la plus utilisée.
  • le décompte des pilules, c’est aussi un outil simple et économique mais il y a un risque de mise au rebut des pilules, l’heure de prise n’est pas prise en compte et elle surestime l’observance.
  • les dossiers de renouvellement des ordonnances en pharmacie, c’est une méthode objective mais elle ne tient pas compte de la mise au rebut des pilules, du partage des pilules, de l’heure de prise inconnue et cette méthode surestime l’observance.
  • l’évaluation de la réponse clinique ou des marqueurs physiologiques est une méthode simple, elle ne prend pas en compte cependant d’autres facteurs qui peuvent affecter la réponse et il y a un risque de surestimation ou des sous-estimation de l’observance.
  • la surveillance électronique des médicaments est aussi une méthode objective et permet d’avoir des données sur l’heure de prise des doses et une surveillance sur de longues périodes, elle ne tient pas compte en revanche de la mise au rebut des pilules, du partage des pilules, elles sous-estime l’observance notamment dans le cas de la soustraction de plusieurs doses pour une prise ultérieure.

Il convient de s’interroger sur les buts de la mesure de cette surveillance et aussi à qui sert la mesure de cette observance ? Au patient ? à l’Assurance-maladie ? aux assurances ?

Il y a des facteurs qui influencent l’observance :

  • la maladie, aigüe ou chronique,
  • les effets secondaires du traitement,
  • le patient, son âge, ses facultés cognitives, sa réaction psychologique à la maladie, à l’évolution de la maladie, sa situation personnelle,
  • le médecin, il convient de passer d’un relation paternaliste à une relation d’alliance thérapeutique,
  • le médicament, sa présentation, son prix.

Pourquoi l’observance est-elle un enjeu de santé publique ? Tout d’abord, la non-observance favorise le risque de rechute, l’escalade thérapeutique. Selon certaines études, la bonne observance permettrait de réduire de moitié la mortalité. Une étude aux Étst-Unis d’Amérique a montré que 33 à 69 % des hospitalisations sont liées à une mauvaise observance.

Comment améliorer l’observance ? Il y a aujourd’hui des dispositifs numériques comme les piluliers électroniques mais il y a surtout un changement de comportement à promouvoir. Il faut passer de l’observance passive aux traitements à la participation active du patient aux objectifs et aux modalités du traitement.

Vincent
Vincent Bildstein, président d’IMS Heallth France

Vincent Bildstein, président d’IMS Health France, a présenté les résultats d’une étude sur l’approche médico-économique de l’observance.

Vincent Bildstein a distingué trois niveaux dans l’observance :

  1. l’« adhérence » ou l’attitude d’adhésion au traitement qui consiste à aller chercher le traitement,
  2. l’observance ou le comportement de respect du traitement tel qu’il a été prescrit,
  3. la persistance ou le comportement de continuation du suivi du traitement dans le temps.

L’observance est devenue un enjeu majeur car certaines études comme celle d’IMS Health montre que 54 % des dépenses de santé évitables sont dues à la non-observance. Améliorer l’observance aurait un impact supérieur à l’apparition de nouveaux traitements. Seulement 43 à 78 % des patients sont observants dans les études cliniques présentées par Vincent Bildstein. En Angleterre, une étude a montré que 1.500 morts pourraient être évitées chaque année grâce à une meilleure observance. Aux Etats-Unis d’Amérique, des études ont analysé les entrées à l’hôpital, 33 à 69 % des hospitalisations sont dues à la non-observance.

La mauvaise observance coûte 9 milliards € / an au système de soins. Ainsi les coûts des complications par pathologie en millions € en dépenses de biens et services médicaux pour une année sont :

  • 4.400 m€ pour l’hypertension artérielle (accident vasculaire cérébral),
  • 1.592 m€ pour l’insuffisance cardiaque (oedème pulmonaire),
  • 1.463 m€ pour le diabète de type 2 (maladies coronariennes),
  • 1.382 m€ pour l’hypercholestérolémie (infarctus du myocarde),
  • 281 m€ pour l’ostéoroporose (fractures ostéoporotiques),
  • 207 m€ pour l’asthme (état de mal asthmatique sévère).

L’observance est faible dans toutes les pathologies chroniques (source : bases IMS – étude permanente de la prescription médicale éd. LTD), en nombre de pateints observants sur 100 patients dans la pathologie :

  • hypertension artérielle : 40 %
  • ostéoporose : 52 %
  • diabète de type 2 : 37 %
  • insuffisance cardiaque : 36 %
  • asthme : 13 %
  • hypercholestérolémie : 44 %

Dans l’hypertension artérielle, 19 % des patients ont un grand problème de gestion de leurs traitements et 42 % consomment au moins 40 % de leurs traitements. En revanche, dans le diabète de type 2, 5 % consomment moins de 20 % de leurs traitements et 21 % ont une adhérence proche d’une bonne adhérence.

Afin d’améliorer l’observance, il ne peut exister que des solutions personnalisées autour de trois grands piliers :

  1. le parcours avec les professionnels,
  2. la gestion de la maladie au quotidien avec des informations et des recommandations adaptées, ce qui suppose que le patient est informé, que le patient est capable, que le patient est motivé et que le patient se rappelle,
  3. le suivi du traitement prescrit.

Les pistes de travail sont donc :

  1. la bonne information, un sésame pour l’adhésion,
  2. la formation des professionnels de santé à la communication,
  3. la création d’outils simples d’usage en consultation et à distance.

Les perspectives de travail pourraient être :

  1. inciter les professionnels à promouvoir l’observance,
  2. mobiliser les associations et l’entourage des personnes malades,
  3. déclarer l’observance grande cause nationale.

 

Le docteur Aline Sarradon-Eck, docteur en médecine et docteur en anthropologie à l'Inserm
Le docteur Aline Sarradon-Eck, docteur en médecine et docteur en anthropologie à l’Inserm

Le docteur Aline Sarradon-Eck, docteur en médecine et docteur en anthropologie à l’Inserm a posé la question, pourquoi les patients appliquent-ils la prescription médicale ou pas ? Selon elle, il y a une distinction entre l’observance et l’adhésion, l’adhésion est nécessaire pour une adéquation entre les perceptions du patient et les perceptions du médecin concernant l’intérêt d’un traitement prescrit. Elle a souligné que le terme « observance » est un terme religieux qui garde une connotation de discipline.

2015.06.01 colloque Observance 24
Le docteur Aline Sarradon-Eck, docteur en médecine et docteur en anthropologie à l’Inserm

Quelles sont les paramètres qui peuvent être pris en compte dans l’adhésion thérapeutique ?

  1. perception du risque et perception de la gravité,
  2. représentation individuelle de la maladie,
  3. représentations sociales de la maladie et de ses causes,
  4. savoirs populaires sur le corps et la maladie,
  5. représentations du médicament (action, efficacité, effets secondaires),
  6. représentations populaires du médicament (médicament poison, produit industriel),
  7. relation médecin / patient (information, communication, confiance).

Concernant l’appropriation du traitement notamment dans la maladie chronique, le patient va expérimenter, il va tester pour voir l’efficacité et contrôler les effets secondaires. Il faut assurer la continuité du traitement et limiter les contraintes, par exemple, la différence entre les quatre semaines calendaires de délivrance des traitements par le pharmacien et le mois d’ordonnance du médecin, il faut par exemple favoriser le conditionnement pour trois mois. Celà suppose aussi une écoute, une compréhension et des conseils du prescripteur, un support de l’entourage de la personne malade.

 

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Le professeur Jean-Luc Harrousseau, président de la Haute autorité de santé, Vincent Bildstein, président d’IMS Health France, le docteur Aline Sarradon-Eck de l’Inserm et le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique

De nombreux témoignages ont été apportés par l’assistance après cette première plénière. Un participant a notamment souligné que l’observance, ce n’est pas seulement l’oubli d’un traitement, ce peut être aussi les iatrogénies, il faut développer le bon usage. Les intervenants sont aussi intervenus sur l’observance des règles d’hygiène de vie. Il y a aussi des différences de genre dans l’observance, les hommes suivent mieux leurs traitements que les femmes.

 

 

Régulation et éthique

 

2015.06.01 colloque Observance 29 - Jean-Pierre Thierry
Jeanne Bossi-Malafosse, avocate au cabinet DLA Piper, le professeur Gérard Lévy, doyen honoraire de la faculté de médecine de Caen, Christine Meyer-Meuret, administratrice de la fédération nationale des associations de retraités, Vincent Vioujas, chargé d’enseignement en droit de la protection sociale à l’université d’Aix-Marseille et le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique

Cette deuxième plénière était animée par Christine Meyer-Meuret, administratrice de la Fédération nationale des associations de retraités. Elle a introduit cette table ronde en demandant comment la liberté de prescription s’articule avec la liberté du patient et avec les enjeux de régulation économique mais aussi de gestion du risque notamment en terme de santé publique.

Le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique, a présenté l’intervention du professeur Gérard Reach, chef du service d’endocrinologie de l’hôpital Avicenne, Assistance publique – Hôpitaux de Paris à Bobigny sur les mécanismes de l’observance : enjeux éthiques.

Il est naturel de ne pas être observant, il existe de nombreuses barrières :

  • le simple oubli,
  • l’ignorance,
  • le manque de compétences,
  • les croyances,
  • les émotions,
  • la douleur ou le plaisir,
  • le désir,
  • les ressources.

Dans la maladie chronique, il y a une opposition entre l’immédiat et le futur, la récompense de la santé apparaît souvent lointaine.

Le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique
Le docteur Jean-Pierre Thierry, médecin de santé publique

Il existe quatre modèles de la relation thérapeutique (Emanuel, 1992) :

  1. le modèle paternaliste : « je décide pour vous »,
  2. le modèle informatif : « je vous dis ce que je sais, c’est vous qui décidez »,
  3. le modèle interprétatif : « je vous dis ce que je sais, c’est vous qui décidez, en plus, je vous aide à définir vos préférences, nous sommes d’égal à égal »,
  4. le modèle délibératif : « je vous dis ce que je sais, c’est vous qui décidez, en plus, je vous aide à définir vos préférences, nous sommes d’égal à égal, en plus, je vous dis mes préférences ».

 

 

 

Vouloir améliorer l’observance implique une réflexion éthique : cette responsabilité vise l’autonomie.

2015.06.01 colloque Observance 36 - Vincent Vioujas
Vincent Vioujas, chargé d’enseignement en droit de la protection sociale à l’université d’Aix-Marseille

Vincent Vioujas, chargé d’enseignement en droit de la protection sociale à l’université d’Aix-Marseille est intervenu sur le thème des nouvelles conditions de l’observance : développement de l’autonomie et nouvelles responsabilités.

La gestion du risque est l’ensemble des actions mises en oeuvre pour infléchir les comportements des acteurs de santé. En changeant tous un peu, on peut tout changer. L’observance vise à responsabiliser les patients et les professionnels de santé à un comportement vertueux mais ne pouvons-nous pas nous interroger ? pourquoi les mesures de santé publique sont-elles toujours des mesures d’incitation pour les professionnels de santé (primes sur des objectifs de santé, de suivi des patients) et des mesures de sanction pour les patients (déremboursements) ?

La problématique de l’apnée du sommeil a mis en exergue cette question de l’observance. 500.000 personnes sont concernées par l’apnée du sommeil, ce sont 400 millions € de dépenses, or 10 à 25 % des dépenses correspondent à des machines non utilisées. Or le Conseil d’État a censuré la décision le 28 novembre 2014 uniquement parce que la décision n’est pas de la compétence du ministère de la Santé au regard du code de la Sécurité sociale. C’est donc sur un problème de forme que le Conseil d’État s’est prononcé et non sur un problème de fond. Il n’y a aucun obstacle juridique à un tel dispositif de sanction de la non-observance. Ceci pose le problème de l’éviction de la relation médicale, dans ce cas de figure, le prestataire était seulement tenu d’informer le médecin et le patient. Ce mécanisme pour l’apnée du sommeil imposait le pouvoir du seul régulateur sur les autres parties. Cette affaire a mis en lumière un débat profond actuel, celui de l’équilibre entre les droits subjectifs et les droits de la société avec le sentiment que les droits individuels ont trop progressé et qu’il faut contrebalance ce nouvel équilibre.

2015.06.01 colloque Observance 37 - Alain Brunot
Alain Brunot de la direction générale de la Santé (DGS) au ministère de la Santé

Alain Brunot de la direction générale de la Santé (DGS) au ministère de la Santé a présenté les nouvelles conditions de l’observance, développement de l’autonomie et nouvelles responsabilités.

Celui-ci a tout d’abord rappelé que toute personne a le droit aux meilleurs soins. Il y a actuellement un prise en compte de la place croissante des maladies chroniques qui nécessite une structuration des soins de proximité et une coordination pluridisciplinaire. L’accompagnement et l’éducation thérapeutique du patient sont des pistes. Les pratiques professionnelles sont un bon levier avec la promotion des bonnes pratiques et les recommandations de la Haute autorité de santé.

 

 

 

Jeanne Bossi-Malafosse, avocate au cabinet DLA Piper
Jeanne Bossi-Malafosse, avocate au cabinet DLA Piper

Jeanne Bossi-Malafosse, avocate au cabinet DLA Piper a souligné que le parcours coordonnée de soins est nouveau dans le cadre de la stratégie de santé. Selon elle, l’outil numérique peut être un vecteur d’évolution des comportements, de la surveillance médicale et de modification des comportements. L’outil numérique est souvent collaboratif et il bouleverse le rapport entre les professionnels de santé, l’information est maintenant partagée mais d’ailleurs sans fondement juridique, ce qui pose notamment le problème de la préservation des données médicales. L’observance est devenue aujourd’hui un outil d’évaluation des produits de santé. Il y a actuellement une démultiplication des volumes de données mais leur évaluation reste insuffisante, il faut développer l’épidémiologie numérique.

 

 

2015.06.01 colloque Observance 42
Le professeur Gérard Lévy, doyen de la faculté de médecine de Caen

Le professeur Gérard Lévy, doyen de la faculté de médecine de Caen a abordé les enjeux éthiques de l’observance. Il a posé trois concepts : autonomie, bienveillance / malveillance, justice / équité. L’intervention de la personne malade sur son parcours de soins nécessite une négociation dans la discussion entre le médecin et son patient. Il faut pouvoir fournir des informations qui permettent à la personne malade de l’éclairer, or l’éducation, dans un contexte d’explosion des sources d’informations, devient de plus en plus difficile. L’autonomie est facilitée par la transmission du message par des experts d’expertise qui partagent leur expertise de leur parcours de soins, de leur parcours de santé, de leur parcours de vie avec leurs pairs.

Le professeur Gérard Lévy a souligné que tous les moyens de surveillance électronique ne pourront pas remplacer la relation humaine dans le parcours de santé. Il s’est aussi interrogé sur la justice et l’équité en santé en prenant l’exemple de la prise en charge des maladies mentales notamment auprès des SDF aujourd’hui en France. Il a conclu son intervention sur la nécessaire formation des médecins.

 

 

Gestion du risque de non-observance

 

2015.06.01 colloque Observance 44 - Dominique Polton
Yvanie Caillé, directrice exécutive de Renaloo, Thomas Fatome, directeur de la Sécurité sociale, le docteur Karim Ould Kaci, directeur médical à la MGEN, Dominique Polton, conseillère auprès du directeur général à la CNAMTS

Cette troisième plénière était animée par Yvanie Caillé, directrice exécutive de Renaloo.

Dominique Polton, conseillère auprès du directeur général à la CNAMTS a présenté plusieurs études scientifiques sur l’observance comme outil de mesure. Ainsi, plus de la moitié des patients commençant un traitement par anti-dépresseurs ne le poursuit pas plus de deux mois. L’observance fait partie d’un des objectifs de certianes actions menées par la CNAMTS. La CNAMTS encourage aussi des programmes de « self management support », d’accompagnement comme Sophia pour le diabète ou l’asthme ou Prado, le programme d’accompagnement du retour à domicile après hospitalisation.

2015.06.01 colloque Observance 45
Dominique Polton, conseillère auprès du directeur général à la CNAMTS

Dominique Polton a souligné la nécessité d’être prudent sur les estimations présentées des économies engendrées par l’observance.

Le docteur Karim Ould Kaci, directeur médical à la MGEN a présenté les actions des complémentaires sur l’observance. Il a présenté quelques chiffres illustrant la non-observance sur certains traitements :

  • anti-asthmatiques: 58 à 85 %
  • traitements préventifs des maladies cardio-vasculaires : 43 %
  • antituberculeux : 20 à 50 %
  • antirejets (après une greffe de rein) : 6 à 26 %
  • antipsychotiques : 75 %
  • antidépresseurs : 53 %
  • antirétroviraux (VIH) : 7 à 10 %
  • ventilation à pression positive continue (apnée du sommeil) : 10 à 12 %
2015.06.01 colloque Observance 49
Le docteur Karim Ould Kaci, directeur médical à la MGEN

Afin d’assurer une prise en charge de qualité des pathologies chroniques, le docteur Karim Ould Kaci a souligné la nécessité de mobiliser les ressources communautaires, les collectivités territoriales, les groupes de personnes malades mais aussi en développant la santé publique autour de la prévention et de l’éducation thérapeutique. Il a aussi présenté des pistes de valorisation de la qualité des soins avec des modes de rémunération des professionnels de santé adaptés, des protocoles de prise en charge et un développement de la formation continue. Il a aussi souligné la nécessité d’une organisation des professionnels en équipe.

 

 

 

 

Afin de répondre aux attentes des médecins généralistes, il a identifié quelques pistes :

  • réponse au manque de reconnaissance des professionnels de santé,
  • sortie de l’« exercice isolé »,
  • soutien aux modes organisationnels innovants,
  • diversification des modes de rémunération,
  • simplification des procédures administratives,
  • formation continue,
  • aide à l’appréhension de l’évolution des rapports médecin/patient.

De la compliance, nous sommes passés à l’observance et aujourd’hui à l’adhésion. Le docteur Karim Ould Kaci a insisté sur l’utilité de l’éducation thérapeutique du patient, sur l’accompagnement, il a ainsi précisé que les changements de comportements sont nécessairement des actions centrées sur l’individu.

2015.06.01 colloque Observance 52
Thomas Fatome, directeur de la Sécurité sociale

Thomas Fatome, directeur de la Sécurité sociale, a axé sa présentation sur l’observance et la régulation économique. Aujourd’hui, dans un environnement contraint, il y a trois catégories de mesures avec le transfert de certaines dépenses vers les régimes complémentaires, la diminution des prix, le changement des pratiques. Ce dernier axe est probablement le plus consensuel car il repose sur l’idée de rendre le système plus efficient en définissant de nouveaux modèles d’organisation.

Il a présenté trois pistes de travail :

  1. positiver l’observance : comment construire des dispositifs pour améliorer l’observance ?
  2. réfléchir aux modes d’élaboration et de construction de ces dispositifs ensemble avec tous les acteurs ?
  3. définir le rôle de la Sécurité sociale dans les dispositifs d’observance et les modes d’évaluation de ces dispositifs.

 

2015.06.01 colloque Observance 54 - Bruno Detournay
Bruno Detournay, directeur général de CEMKA-Eval

Bruno Detournay, directeur général de CEMKA-Eval, a conclu cette troisième plénière en soulignant que l’observance était un souci des professionnels de santé mais rarement un souci des personnes malades elles-mêmes. En tant que professionnel de l’épidémiologie et de la santé publique, il a insisté sur le fait qu’il existe peu d’outils de mesure de l’observance et il y a actuellement extrêmement peu d’études scientifiques contrôlées d’évaluation de l’observance.

Yvanie Caillé a conclu en soulignant que le coeur de l’observance, c’est la relation soignant-soigné alors même que la communication avec le patient n’est pas abordée dans les études de médecine.

 

 

L’observance en pratiques

2015.06.01 colloque Observance 60
François Berdougo, coordinateur du collectif [im]Patients, Chroniques & Associés
Cette quatrième plénière était animée par François Berdougo, coordinateur du collectif [im]Patients, Chroniques & Associés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2015.06.01 colloque Observance 62
Le docteur Pierre de Haas, président de la Fédération française des Maisons et pôles de santé (FFMPS)

Le docteur Pierre de Haas, président de la Fédération française des Maisons et pôles de santé (FFMPS) a présenté tous les avantages d’une équipe coordonnée de soins primaires dans la structuration des soins et dans l’accompagnement des personnes malades au long cours, médecins généralistes, pharmaciens, infirmières, kinésithérapeutes, laboratoires d’analyses médicales etc. Cette structuration permet notamment une homogénéisation de l’information.

 

 

 

 

 

 

2015.06.01 colloque Observance 65
Le docteur Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP)

Le docteur Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) a tout d’abord souligné que les pharmaciens pouvaient maintenant participer à l’éducation thérapeutique du patient.

Elle a présenté les problèmes de la galénique et des plans de posologie.

Elle s’est inquiétée, avec tous les traceurs aujourd’hui, serai-je demain toujours soigné si je ne suis suis pas observant ? Elle a souligné que les personnes malades ne peuvent pas avoir des trajectoires linéaires tout au long de leur vie et qu’il faut admettre le droit à l’erreur.

 

 

 

 

2015.06.01 colloque Observance 66 - Thomas Sannié
Thomas Sannié, président de l’Association française des hémophiles (AFH)

Thomas Sannié, président de l’Association française des hémophiles (AFH) a commencé sa présentation en précisant que le mot « observance » était inadapté car il renvoie à une surveillance. L’enjeu aujourd’hui pour les personnes malades, c’est l’adhésion au traitement. Aujourd’hui, en France, selon les chiffres de la CNAMTS en 2011, 25 % des Français souffrent d’une maladie chronique et 15 % sont en ALD. Selon l’étude de Coulter et al., 2014, une personnes malade passe en moyenne entre 5 à 10 heures par an avec les professionnels de santé. Il y a donc un abîme entre le temps vécu de la maladie chronique par la personne malade et le temps passé avec les professionnels de santé. L’éducation thérapeutique et les programmes d’accompagnement par les pairs permettent de renforcer l’autonomie des personnes malades.

 

 

2015.06.01 colloque Observance 68 - Pierre Casadevall
Pierre Casadevall, président de la Fédération française des associations et amicales de malades insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR)

Pierre Casadevall, président de la Fédération française des associations et amicales de malades insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR) a souligné la nécessité de la formation de tous les acteurs de santé, les personnes malades certes mais aussi tous les autres acteurs et notamment les médecins ou les prestataires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2015.06.01 colloque Observance 70
Claude Sokolowski, président de la Fédération française des diabétiques (AFD)

Claude Sokolowski, président de la Fédération française des diabétiques (AFD) a présenté les ateliers d’éducation thérapeutique pour vivre avec le diabète avec des patients experts.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2015.06.01 colloque Observance 72 - Christian Saout
Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS

Christian Saout, secrétaire général délégué du CISS, a conclu cette journée en insistant sur trois points :

  1. l’objectif de l’observance ne peut être la sanction,
  2. l’outil numérique n’est pas un risque,
  3. la formation des soignants est au coeur de l’observance.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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